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Médecins Sans Frontières, Antenne de Lille

Blog de l'Antenne M.S.F. de Lille. Retouvez l'actu et les évènements organisés par l'antenne.

En direct du terrain

Olivier Aubry, technicien de laboratoire, bénévole à l'antenne de Lille est actuellement en mission en Géorgie. Il nous conte depuis le terrain son expérience au quotidien sur une mission consacrée à la prise en charge de patients atteints de tuberculose multi-résistante... 

 


Une arrivée sur le terrain par le train... typiquement atypique !

14/09/2006

Me voici arrivé sur le terrain depuis 5 jours maintenant. Avant cela bien sûr il y a eu les briefings au siège : deux jours de meeting avec les différents bureaux, médicaux, administratifs, blablabla…

Et puis hop ! un taxi nous conduit à l’aéroport. Je dis nous car je suis accompagné de Guido, le nouveau pharmacien de la mission. On fait un peu plus connaissance dans les embouteillages. Lui comme moi avons déjà fait des missions dont une en commun, le Libéria.

Ensuite c’est l’aéroport, les formalités administratives pour passer un peu de matériel que l’on emmène avec nous. Puis on attend encore pour embarquer… Destination…la Géorgie. Cinq heures de vol tranquille et on atterrit à Tbilisi. Là, comme sur toutes les missions, quelqu’un est là pour vous accueillir (enfin normalement!). Cette fois ci c’est Julien, le pharmacien que Guido vient remplacer, qui s’y colle.

Durant le trajet qui nous conduit au bureau, Guido et Julien commencent à faire connaissance. Moi j’ai le nez collé à la fenêtre de la voiture, découvrant Tbilisi. Le style soviétique de certains bâtiments est bien présent, mais surtout ils n’ont pas vu ne serait ce qu’une couche de peinture depuis bien longtemps! Et surtout, que penser du centre même de Tbilisi dont les principaux bâtiments ainsi que la route auraient été retapés uniquement pour la venue de W. Bush ? ? ? Le président géorgien est réputé aimer les fontaines… il y en a un peu partout dans la ville. Les vielles Lada, souvent à bout de souffle, terminent de planter  le décor…

Au bureau on retrouve le reste de l’équipe de la capitale: Il y a Thomas, le chef de mission malgré les apparences (c’est lui qui le dit !), Babak le MedCo en langage MSF (Coordinateur médical), et Sharrif l’administrateur. Il y a aussi Safi le Log-Admin de Zugdidi qui est là pour sa semaine de break. 

Nous voici maintenant tous réunis autour d’une bière de bienvenue et les conversations tournent autour des missions communes ou des gens avec qui on a bossé à un moment ou à un autre. Tous ça se passe à la maison, une télé est allumée dans un coin et on éclate de rire en se surprenant, nous tous, quelques français, un afghan, un iranien, un soudanais, un italien, en train de regarder un film indien traduit en russe !! Bienvenue dans la mission Géorgie !

Le jour suivant l’arrivée est traditionnellement dédié aux briefings…et donc c’est ce qui se passe. Le briefing sur le contexte d’intervention et la sécurité, c’est l’affaire de Thomas, Babak s’occupe quant à lui du briefing médical. Sans rentrer dans trop de détails pour le moment, il s’agit de Tuberculose multi-résistante....

Je quitte Tbilisi après deux jours passés ici, direction Zugdidi, accompagné de Thomas et Babak. L’originalité est que nous partons de nuit et en train. C’est beaucoup moins cher et on gagne du temps. Nous avons un compartiment couchette pour nous trois et on va avoir le temps de discuter puisqu’il est prévu que l’on mette neuf heures pour parcourir les 300 et quelques kilomètres qui séparent Tbilisi de Zugdidi! Après quelques discussions sérieuses concernant le programme mais aussi de franches rigolades, Thomas et moi finissons la soirée à la fenêtre qui reste ouverte une fois calée à l’aide d’une bouteille. Ce soir là la nuit est fraîche et agréable et nous discutons de choses et d’autres, mais surtout de MSF pendant que le train longe tranquillement les montagnes du Caucase éclairées par la lumière de la Lune…

Le jour se lève sur la gare de Zugdidi…

A bientôt,
                                                                                                                                     Olivier

En savoir plus sur la Géorgie


23 Septembre 2006

Faut quand même que je vous raconte de quoi tout ça retourne. On est à Zugdidi pour ouvrir un programme de TB mdr. Autant se familiariser tout de suite avec les termes qu’on utilise tous les jours ! Une fois traduit, ça donne Tuberculose « multi drugs resistant » . 

Sans rentrer dans trop de détails et pour faire court, le gouvernement Géorgien a développé un protocole de prise en charge des patients atteints de tuberculose. Parmi ces patients, on sait qu’une partie d’entre eux sont atteints par la forme résistante de la bactérie (c’est à dire qu’elle est insensible aux antibiotiques « habituels »).

M.S.F. a décidé de mettre en place un programme. Tb mdr, en collaboration avec le gouvernement, dans toute la région Samagrelo, région frontalière de l’Abkhazie. C’est une première pour la Géorgie puisque pour la première fois dans ce pays, des patients atteints de TB mdr vont être pris en charge. 

Le programme n’a pas encore débuté et nous sommes pour l’instant dans la phase de préparation à l’ouverture. Nous allons travailler sur tout le deuxième étage d’un hôpital déjà existant mais qui nécessite un peu de rénovation avant de pouvoir y accueillir les premiers patients. Certaines pièces sont déjà en partie terminées et on commence à avoir une idée assez claire du résultat final.

Du côté médical, on s’active à mettre en place les protocoles en collaboration avec le directeur de l’hôpital, on prépare la formation des médecins et infirmières, on travaille à la qualité du diagnostic et au suivi de l’efficacité des traitements.

La nouvelle de la restauration de l’hôpital et de l’ouverture d’un programme Tb mdr a bien sûr déjà fait le tour de la ville. Depuis quelques jours maintenant, nous sommes sollicités pour différentes raisons. La première concerne les quelques emplois que l’ouverture d’un programme peut créer. Mais surtout, à   plusieurs reprises, des familles de personnes atteintes de Tb sont venues nous demander de faire quelques chose pour leur proche. Malheureusement, nous ne pouvons répondre positivement à ces demandes pour l’instant, mais nous nous savons attendus… 

A bientôt

                                Olivier




05 Octobre 2006

Voilà c’est parti ! Le programme a débuté. Enfin presque. Nous avons débuté la phase de diagnostic avec les premiers prélèvements diagnostiqués par le laboratoire. C’est en réalité un peu plus complexe que ça. Le laboratoire de l’hôpital de Zugdidi ne fait que diagnostiquer les patients atteints de tuberculose. La structure ne permettant pas d’aller plus loin dans le diagnostic, les prélèvements sont ensuite acheminés à Anvers vers un laboratoire dit « supranational ». C’est ce laboratoire qui réalisera les tests de sensibilité aux antibiotiques et qui déterminera quelle souche bactérienne est résistante ou non aux antibiotiques (nous allons prendre en charge uniquement les patients atteints de la forme résistante de la maladie).

Tout cela demande évidemment une bonne organisation logistique. Les prélèvements sont tout d’abord conservés en chaîne de froid, puis expédiés par voiture jusqu'à Tbilisi. De là, ils partent vers Anvers grâce à un célèbre service d’envoi rapide. Une fois pris en charge au Laboratoire de Médecine Tropicale d’Anvers, les analyses complémentaires sont lancées. Bien évidemment, cela prend du temps. Cependant, le plus long dans tout ça est l’analyse elle-même. En effet, les tests de sensibilité aux antibiotiques pour les Mycobactéries (la bactérie responsable de la tuberculose), nécessitent quatre à six semaines avant de pouvoir rendre le résultat  définitif. Puis les résultats nous reviennent par email. Le calcul est donc vite fait : les premiers patients seront admis début novembre !

Coté logistique, les travaux de réhabilitation avancent. Le changement est spectaculaire. Le carrelage est en partie posé, mais surtout les chambres sont peintes. Ce qu’on peut dire c’est que se sera coloré et lumineux ! (cf galerie de photos)
Du coté médical, on continue à travailler sur la formation des médecins et le processus de recrutement des infirmières est en cours.

Pour finir l’équipe s’étoffe, une psychologue est arrivée, une infirmière est attendue très prochainement. L’équipe sera donc bientôt au complet et l’on sera prêt pour la première admission du programme…

Olivier



21 Octobre

C’est quoi une journée type ? Comment vit-on en mission ? Quels genres de relations avons nous avec la population ? Voici quelques-unes unes des questions qui reviennent le plus souvent lors de nos réunions d’info à l’antenne.

Ici la journée commence par une réunion d’équipe, tous les matins à 9h. Cela permet d’échanger les infos, d’organiser la journée et les « cars mouvements ». Puis chacun s’active jusqu’à 13h, heure à laquelle toute l’équipe se réuni à nouveau mais pour le repas cette fois. Les Géorgiens expédient le repas en 15 minutes, les Français sont toujours les derniers à quitter la table, question de culture…! L’après midi se passe généralement au bureau, on fait le point sur les différents problèmes rencontrés le matin, on travaille sur les « trainings », on s’occupe des commandes ou on écrit quelques rapports…

Une fois la journée de travail terminé, il n’y a qu’à traverser la route pour retrouver la maison. Nous vivons dans une grande maison que nous louons.  Surina, la propriétaire, habite toujours dans une partie de la maison et s’occupe de l’intendance. Pour tout dire, elle nous chouchoute un peu, parfois trop, mais ça aussi c’est une question de culture, l’hospitalité géorgienne n’est pas une légende.

Le week-end, nos collègues Géorgiens ne travaillent pas et pour l’équipe des expatriés, le samedi permet de travailler sur des choses qu’on n’a pas eu le temps de faire la semaine (ou d’écrire cette petite lettre !!). Comme ici il n’y a pas vraiment de problème de sécurité, le reste du week-end est consacré à la vie sociale. Le marché local est très animé et on commence à y être connus ! Il faut dire qu’il ne passe pas beaucoup d’étrangers à Zugdidi. La campagne alentours offre également quelques possibilités de belles  balades. Ça peut être aussi une soirée avec nos collègues du CICR et MDM ou encore une invitation à une fête géorgienne pour une naissance ou un anniversaire.

Tout ça permet de bien décompresser car en ce moment la charge de travail est élevée pour tout le monde, on approche de plus en plus de l’ouverture du programme à proprement parler avec les premières admissions…

 

Olivier


 

21 Novembre.

Une très grande partie de la réhabilitation du deuxième étage de l’hôpital est achevée. Les premiers résultats des prélèvements envoyés début octobre viennent de nous revenir du laboratoire d’Anvers et les premiers cas de Tb mdr viennent d’être diagnostiqués. Le programme vient officiellement de commencer avec l’admission des deux premiers patients.

 

D’autres admissions sont prévues dans les jours à venir. Le premier d’entre eux est un jeune adulte de 20ans, il est grand et mince. Il a un style bien à lui et l’énergie d’une personne de son age. Il s’est déjà approprié sa chambre et y a déjà recréé son univers. Le second est un père de famille âgé de 47ans. C’est la deuxième tentative de traitement pour lui, il a déjà passé 3 mois sur un programme Tb « régulière » (non résistante). Ces patients vont devoir subir environ 2 ans de traitement ; une phase intensive d’au moins 6 mois, avec 4 mois minimum d’hospitalisation, une injection pratiquement tous les jours et une prise orale de médicaments qui peut aller jusqu’à 2O comprimés/jour.

 

Puis une phase de continuation avec la prise du traitement à domicile, pour au moins 15 mois. La prise des médicaments est journalière et doit être très stricte. Ce traitement dont l’efficacité est limitée, a en plus des effets secondaires comme des atteintes rénales, hépatiques, oculaires, auditives…

 

Dans ces conditions, les patients doivent être prêts à accepter ce traitement, long et difficile. Dans ce genre de programme on sait que beaucoup de ces patients souffrent d’anxiété sévère ou de dépression modérée. Pour les aider à surmonter cela et améliorer leur qualité de vie, une assistance psychologique leur est fournie tout au long du traitement. La prise en charge psychologique commence d’ailleurs avant l’admission des patients avec un travail en amont qui consiste à évaluer l’encadrement et le soutien familial de chacun mais aussi de s’assurer de leur adhésion au programme.

 

Ces admissions sont le résultat de plusieurs mois de travail pour toute l’équipe. Une partie de l’équipe expatriée n’a d’ailleurs pas assisté à ces premières admissions ayant rejoint leur pays d’origine avant. Mais aujourd’hui l’ensemble de l’équipe MSF de Zugdidi est content. On entre dans une nouvelle phase du programme. Après la phase de réhabilitation et de préparation, on entre enfin dans la phase pour laquelle on a tous travaillé : la prise en charge des patients…



        A bientôt...      

                            Olivier

                                            (voir la galerie de photos)

 

                                                              

 


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